L’investissement immobilier en Belgique représente pour de nombreux entrepreneurs un moyen efficace de valoriser leur patrimoine, qu’il s’agisse de biens destinés à la location ou de leur résidence principale. L’accès au financement bancaire repose souvent sur un apport personnel significatif, ce qui peut constituer un obstacle lorsque la disponibilité de liquidités est limitée. L’Engagement Individuel de Pension (EIP) constitue alors un instrument stratégique permettant de transformer une épargne retraite en levier financier, tout en bénéficiant d’un cadre fiscal avantageux.
L’EIP et la constitution d’une épargne retraite
L’EIP est un contrat d’assurance pension conclu par la société au profit de son dirigeant. Les primes versées par l’entreprise sont déductibles à l’impôt des sociétés (moyennant retenue de 4,4%), sous réserve du respect de la règle des 80 %. Cette règle impose que la somme de la pension légale et de la pension extralégale (complémentaire constituée via l’EIP) ne puisse excéder 80 % de la dernière rémunération annuelle brute normale du dirigeant.
En addition des primes annuelles versées par la société, le mécanisme du backservice permet, sous certaines limites, de régulariser des années antérieures pour accélérer la constitution de la réserve disponible.
La mise en place d’un EIP nécessite un calibrage équilibré par la compagnie d’assurance qui, sur base des données du dirigeant et de la capacité financière de la société, va établir un plan d’EIP cohérent. Le recours à ce type de produit d’assurance doit également respecter d’autres conditions pour assurer une parfaite conformité fiscale : plan de rémunération fiable et constant au fil des années et paiement de la rémunération du dirigeant sur base récurrente, justifiée par des fiches de salaire mensuelles.
L’utilisation de l’EIP comme levier financier
Traditionnellement, l’EIP a pour finalité la préparation de la retraite. Cependant, la flexibilité offerte par ce produit permet aujourd’hui de l’utiliser comme instrument de financement immobilier, via deux méthodes principales.
Avance sur réserve à terme
La première méthode consiste à obtenir une avance sur la réserve à terme constituée dans le cadre de l’EIP. L’assureur peut consentir une avance équivalente à 60–75 % de la valeur accumulée, sous condition que les fonds soient affectés à un projet immobilier concret. Il peut s’agir d’un bien locatif générant des revenus imposables ou d’un logement destiné à l’usage personnel du dirigeant. Cette avance permet de mobiliser des fonds préalablement constitués sans devoir puiser dans ses liquidités personnelles, offrant ainsi un levier financier significatif.
L’investissement immobilier peut se situer dans l’Espace Économique Européen (EEE), mais la garantie hypothécaire ou le gage de l’avance est généralement constitué sur un bien en Belgique ou sur tout autre bien accepté par la banque/assurance.
Mise en gage de l’EIP
La deuxième méthode repose sur l’utilisation de l’EIP comme garantie bancaire. Dans ce cadre, l’assureur agit en qualité de prêteur, mettant la réserve à disposition pour sécuriser un crédit immobilier, sous forme de bullet. Le dirigeant ne rembourse donc que les intérêts et le capital est soit prélevé sur la réserve à terme, soit remboursé avant par le dirigeant via d’autres appors. Cette technique permet d’accroître la capacité de financement sans toucher directement à la réserve destinée à la retraite. L’effet de levier peut ainsi être maximisé en combinant cette mise en gage avec une avance sur contrat, tout en maintenant la continuité de l’épargne retraite.
Illustration pratique
Prenons l’exemple d’un dirigeant rémunéré 90 000 € bruts annuels, dont la société verse 20 000 € de primes EIP annuelles depuis quatre ans. La réserve accumulée atteint environ 80 000 €. En mobilisant une avance sur réserve à hauteur de 70 %, soit 56 000 €, et en utilisant l’EIP comme garantie bancaire pour financer le solde du prix d’achat d’un bien estimé à 350 000 €, l’investisseur bénéficie d’un financement optimisé. Les loyers perçus (ou les économies de loyer pour habitation propre) couvrent les mensualités du crédit et de l’avance, tandis que la société continue de verser les primes EIP, reconstituant progressivement la réserve. L’effet de levier permet ainsi de doubler le rendement sur fonds propres, passant d’un rendement net de 6–7 % à 12–14 %.
Conclusion
L’EIP constitue donc un instrument stratégique pour les dirigeants belges, offrant une double fonction : la préparation de la retraite et le financement immobilier. En transformant une réserve de pension en quasi-fonds propres, il permet de financer des projets immobiliers tout en optimisant le rendement et en réduisant la charge fiscale immédiate.
Et lorsque l’on sait que le Fisc mène actuellement une chasse aux sorcières contre les propriétaires d’immeubles d’habitation en société, le recours à ce mécanisme peut s’avérer d’autant plus intéressant :
il est ainsi possible de financer partiellement via les liquidités de la société l’achat d’un immeuble à 100% en privé.
Néanmoins, la mise en œuvre de ce mécanisme requiert prudence et planification, et doit être réalisée en concertation avec un conseiller fiscal et financier pour anticiper les implications à long terme. N’hésitez pas à consulter nos collaborateurs pour des conseils sur mesures adaptés à vos besoins.